25

Studio Leonard
1960
Montréal
ATTACHEMENT AUDIO


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Studio Layton

À la fin des années 1940, le studio Layton Brothers, au 1170 de la rue Sainte-Catherine Ouest, offre aux musiciens l'alternative moins coûteuse de graver les enregistrements directement sur le disque. L´ingénieur de ce studio, John Bradley, devient responsable du matriçage (mastering) chez Compo à Lachine puis chez London à Montréal. Il acquiert à New York un magnétophone Ampex, en même temps que Jean-Marc Audet. Bradley avait travaillé auparavant pour les fils de Berliner dans les années 1930. La maison Layton existe encore. On y vend du matériel audio.

Studio Leonard

Au début des années 1960, David P. Leonard, directeur de l´institut Trebas, ouvre un petit studio (Leonard studio) avec un magnétophone Ampex acheté à New York, offrant une alternative moins coûteuse aux musiciens, avec un équipement moins professionnel que celui des grands studios. Il a aussi fondé l´étiquette Monticana, tout en enregistrant parfois pour London, RCA et Columbia, des productions de moindre envergure d´une facture plus risquée. Avec l´exemple de la compagnie Sun, les multinationales s´aperçoivent qu´il est parfois rentable d´enregistrer à l´extérieur de leurs grands studios. David P. Leonard travaille dans un des premiers studios à New York où l´enregistrement multipiste est utilisé de façon professionnelle (magnétophone de trois ou quatre pistes). Il sera aussi le premier à importer cette technologie au Canada. Les studios indépendants émergent pour répondre à une approche plus personnalisée et innovatrice.

David P. Leonard (technicien et preneur de son, directeur et fondateur de l´Institut Trebas à Montréal)

À propos de l´ingénieur du son et du graveur John Bradley
(30´´) - David P. Leonard, enregistré en 2006

«John Bradley, c´était, non pas l´ingénieur, mais le responsable pour la qualité de pressage et de matriçage (mastering). C´est lui qui était l´ingénieur du son en 1948 pour mon enregistrement [au studio] Layton Brothers. Il a travaillé avec le groupe qui a travaillé avec les frères Berliner, avec Thompson je pense, dans les années 1930, avant la seconde guerre mondiale.»

27

Salle de mixage du studio Marko
2006
Montréal


28

Studio Marko

Jean-Marc Audet, ancien employé de CKAC, fonde en 1948 le studio Marko, au coin des rues Sainte-Catherine et de la Montagne. L´endroit peut accueillir un orchestre. Auparavant, Audet opérait avec un studio mobile. Il s´était procuré un des premiers magnétophones à Montréal. Il s´est spécialisé par la suite dans les enregistrements de publicité.

Le studio Marko est déménagé ensuite sur la rue La Gauchetière en 1967, dans un des premiers studios privés à bénéficier d´un immeuble conçu spécifiquement pour l´enregistrement (insonorisation intégrale des bruits de l´extérieur et bonne acoustique à l´intérieur). RCA, devant répondre à des besoins grandissants, avait antérieurement construit ce studio selon ses normes (les plans étaient reproduits un peu partout dans le monde). Des conques convexes, similaires à celles du studio Victor, sont encore présentes. Félix Leclerc a enregistré chez Marko un de ses premiers disques, Le P´tit train du Nord. Les grands studios tels que Marko, Stereo Sound et RCA possèdent des chambres d´écho naturelles et des graveurs de disques onéreux. Les petits studios doivent accomplir la postproduction chez ces grands joueurs ou chez Sound Scription Service.

Au milieu des années 1980, Marko se lance dans la production vidéo et la postproduction de films. Serge Lacroix, chef ingénieur du son au studio Marko, acquiert en 1986 environ le premier système numérique d´enregistrement fonctionnel à Montréal, soit le système Opus huit pistes qui se vendait environ 250,000$ à l´époque.

En 1991, Hans Peter Strobl, mixeur et ingénieur du son au studio Marko, a remplacé l´ancien système analogique et le travail sur ruban par un nouveau système de montage sonore et de postproduction pour le cinéma. Le montage sur vidéo et le système numérique appliqué intégralement plus tard ont grandement amélioré les services en terme de rapidité et de flexibilité. Pour offrir ces nouveaux services, Marko a acquis l´ancien studio d´André Perry à Montréal (Son Québec) sur Amherst.

29

Studio Piccolo
2006
Montréal


30

Studio Piccolo

Le studio Piccolo est créé en 1975. Comme plusieurs indépendants, l´entreprise commence avec un magnétophone quatre pistes, puis acquiert des équipements de plus en plus professionnels. L´enregistrement 24 pistes est répandu dans les grands studios. Il en coûte entre 45,000$ et 70,000$ à l´époque pour acquérir ce magnétophone qui deviendra accessible aux petits studios plus tard. De nouvelles compagnies offrent des consoles et magnétophones à prix plus accessibles, permettant l´émergence de studios indépendants. L´investissement est encore élevé, soit quelques centaines de milliers de dollars. Le tarif demandé aux musiciens est évalué en conséquence, oscillant entre 100 et 250$ de l´heure. Les meilleurs studios se développeront pour enfin se convertir à la technologie numérique et atteindre parfois des offres de services de niveau international.

Les plus grands studios offrent de grandes salles avec une acoustique de grande qualité. Piccolo fait partie de cette catégorie, avec ses cinq studios, en plus des services de studio mobile.

Studio Saint-Charles

Dans les années 1970, les studios indépendants émergent, devenant de plus en plus professionnels et compétitifs. L´acousticien Serge Melançon, qui a travaillé au Lincoln Center, a conçu le studio Saint-Charles, en banlieue de Montréal (Longueuil). Ce studio fondé par le preneur de son Pierre Tessier, jouit d´un bon équipement et d´une bonne acoustique naturelle. Plusieurs enregistrements de l´âge d´or de la chanson québécoise ont été enregistrés à ce grand studio qui pouvait accueillir plus de 40 musiciens. Plusieurs expérimentations ont également été menées à cet endroit. Pierre Tessier a oeuvré auparavant chez Stereo Sound.

Studio Stereo Sound

Dans les années 1960, le studio Stereo Sound, situé dans le quartier Côte-des-Neiges au pied de la montagne, est une des rares alternatives valables à la multinationale RCA. À l´instar de RCA, ce grand studio possède aussi des chambres d´écho. Il y règne une ambiance stimulante qui fait cruellement défaut au studio RCA. En 1967, ce studio est équipé d´un magnétophone quatre pistes. L´ingénieur du son Gatien Roy a fait beaucoup d´enregistrements d´artistes populaires dans ces années. Pierre Tessier a oeuvré chez Stereo Sound, pour fonder par la suite le studio Saint-Charles. Michel Lachance a aussi travaillé chez Stereo Sound. Il est devenu chef ingénieur pour le studio Tempo, puis réalisateur (notamment de l´album l´Heptade d´Harmonium). Paul-Émile Mongeau, anciennement du studio Stereo Sound, sera en charge de la gravure et du matriçage (mastering) chez London en 1955.

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Microphones haut de gamme utilisés au studio 12 et au studio Saint-Urbain notamment
2006
Montréal


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Studio Saint-Urbain

Avec l´arrivée des studios de réalisateurs, sans espace consacré à l´enregistrement sonore, et des studios domestiques de musiciens, suite à la démocratisation des équipements, les studios s´adaptent. Ils offrent des espaces avec une acoustique de bonne qualité, des services de postproduction et de matriçage (mastering), et des techniciens qualifiés. Le studio Saint-Urbain, ouvert en 2004, suit cette logique. Il compte sur la formation à l´Université McGill de ses trois associés, dont le doyen André White, qui y a enseigné, et sur leurs sensibilités de musiciens à l´écoute des besoins des clients. White est un batteur de jazz qui a joué avec Sonny Greenwich. Le rôle du preneur de son en musique spécialisée change radicalement avec l´émergence des productions indépendantes gérées par les musiciens eux-mêmes : le technicien suggère et conseille plutôt que d´imposer. Ce studio vise une clientèle de musiciens cherchant une acoustique et des conseillers de premier ordre.

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Studio Tempo original (Archives de Billy Szawlowski)
1974
Montréal
ATTACHEMENT DE TEXTE


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Studio Tempo

Historique du studio :

Ce studio ouvre ses portes en 1972 sur McGill College, au centre-ville. Fermé depuis quelques années, c´est un des rares studios montréalais à opérer pendant 30 ans. Au début, trois magnétophones sont fonctionnels : un quatre pistes, un huit pistes et un seize pistes. Copie exacte du studio Record Plant à New York, les plans ont été achetés de Tom Headly, concepteur et acousticien pour les studios Westlake. Ce nouvel établissement jouit d´une acoustique bien pensée et d´équipements normalisés (console préfabriquée) qui ont fait leurs preuves ailleurs dans le monde. Ce qui est perdu en originalité, y est gagné en fiabilité et en flexibilité, un projet pouvant être enregistré à plusieurs endroits ayant le même design sonore. Tom Headly a aussi conçu le studio CINAR sur la rue Saint-André à Montréal, près de Sainte-Catherine. Ce modèle de studio avec son acoustique appréciée en musique populaire, à l´avant-garde pour l´époque, a été adopté par les trois fondateurs, François Cousineau, Bernard Scott et Yves Lapierre. Le studio d'André Perry sur Amherst ne disposait pas d´une acoustique aussi soignée, ce qu´il corrigera à Morin Heights. Tous ces musiciens ont amené avec eux une clientèle dès le début des opérations. Michel Éthier, Michel Lachance, et Ian Terry, les trois premiers chef ingénieurs du son, s´ajoutent à l´équipe. Le studio Tempo acquiert un 24 pistes assez tôt dans son histoire.

En 1976, devant des rumeurs d´expropriation, le studio Tempo déménage à Pointe Saint-Charles, dans un ancien cinéma. La console Neve est remplacée par une console britannique faite sur mesure. Ian Terry devient ingénieur du son en chef et participe à la configuration du studio et de la console. Le studio Tempo a ensuite été acheté par Modulations pour la postproduction sonore en audiovisuel.

Collaborateurs :

Michel Éthier a travaillé chez RCA, chez André Perry et chez Tempo, développant une réputation de rapidité et d´efficacité. Il a été le premier québécois à recevoir un Juno. Michel Lachance est devenu chef ingénieur pour le studio Tempo, puis réalisateur. Il est un des premiers preneurs de son engagé par André Perry dans son premier studio. Il a aussi travaillé chez Stereo Sound. Doté d´une grande sensibilité musicale, il a concocté pendant plus d´un an l´un des albums les plus peaufinés de l´histoire du disque au Québec, l´Heptade d´Harmonium. Ian Terry, d´abord engagé par André Perry, a été assistant de Michel Lachance chez Tempo, un an après l´ouverture de ce studio. Il est devenu responsable technique en 1976. Ian Terry a enregistré et réalisé plusieurs albums de musiciens d´ici. Entre 1985 et 2000, il s´est consacré au jazz, enregistrant 135 disques pour l´étiquette Justin Time, aux studios Tempo, Victor, ainsi qu´aux États-Unis. Plusieurs techniciens ont débuté comme assistants chez Tempo, dont Billy Szawlowski et Pierre Pagé, devenu un preneur de son renommé et un réalisateur de plusieurs albums de vedettes au Québec. Billy Szawlowski, excellent guitariste, a succédé à Ian Terry comme réalisateur d´April Wine et de Mahoganny Rush.

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Studio Victor avant son abandon temporaire
1948
Montréal


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Studio Victor (Studio Son Soleil)

Le plus vieux studio encore en opération à Montréal a été construit par RCA en 1943, à Saint-Henri, dans un local adjacent à l'usine. Ce vaste studio à la fine pointe de la technologie de l'époque est doté d'une excellente acoustique, grâce à des panneaux en bois ondulés. Il s'agit de l'actuel studio Victor qui abrite aussi le Musée des ondes Berliner consacré aux appareils de reproduction et d'enregistrement sonore. Ce studio a été détourné de sa fonction première de 1958 à 1985, servant alors de lieu pour la conception d´un satellite, puis d´entrepôt chez RCA.

Avant de se lancer dans la revitalisation de ce studio en 1985, les frères Pilon ont fondé au début des années 1980 le studio Son Soleil à Saint-Henri, dans un sous-sol. Le nouveau studio Victor a acquis une réputation enviable ici et à l´étranger, notamment dans les enregistrements qui exigent une acoustique de qualité optimale. L´entreprise possède deux studios et une salle de matriçage (mastering).

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Plafond ondulé d'un des studios de RCA Victor établis à Montréal
2000
Montréal
ATTACHEMENT AUDIO


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Studios de RCA Victor

Depuis 1903, la multinationale RCA Victor a offert toute la gamme de services permettant de mettre en marché les enregistrements sonores. Plusieurs compagnies ont occupé les locaux de l´usine Berliner. Victor Talking Machine Company achète la Berliner Gramophone Company of Canada et sa filiale His Master's Voice en 1924. Victor avait l'oeil sur l'usine de Montréal, concurrente de l'usine de Camden au New Jersey. Avant qu'Herbert Berliner ne fonde Compo (voir studio de Berliner), la compagnie Victor n´apprécie guère l'essor des disques canadiens, au détriment de ceux pressés aux États-Unis. Victor publie commercialement le premier enregistrement électrique en 1925. En 1929, la compagnie Radio Corporation of America (RCA) acquiert à Montréal la Victor Talking Machine Company et devient la RCA - Victor.

En 1943, un vaste studio à la fine pointe de la technologie de l'époque est construit par RCA Victor à Saint-Henri, dans un local adjacent à l'usine (voir studio Victor).

En 1949, RCA Victor lance le 45 tours, dont ses séries en vinyle rouge, jaune ou vert. D'abord conçu pour concurrencer le 33 tours, RCA adopte ce format pour la musique classique, et destine le 45 tours aux succès populaires. Dans les années 1950, la demande commence à se diversifier avec le boom économique de l'après-guerre et l'affirmation d'une génération qui s'imprègne à fond de la société de consommation. Lors de cette décade, RCA Victor ouvrira un autre studio, à proximité de l´actuel station de métro Guy - Concordia, consacré à l´enregistrement de la musique populaire et à la publicité.

L´essor de l´entreprise à Montréal se poursuit, obligeant en 1967 la compagnie à construire un autre studio à la fine pointe des développements acoustiques et techniques (voir studio Marko), sur la rue La Gauchetière. RCA acquiert un magnétophone Ampex 350 trois pistes. RCA continue d´être la pierre angulaire de l´industrie du disque, offrant des services de gravure, de matriçage (mastering) et de pressage, contrairement aux autres studios concurrents. À partir de la fin des années 1950, les studios indépendants profitent de la concurrence entre RCA et London pour la gravure et le matriçage (mastering) des disques.

Michel Descombes travaille pour la compagnie RCA de Montréal de 1964 à 1967. Il commence à faire du matriçage (mastering) au studio situé sur la rue Guy de Montréal, puis devient assistant-technicien de studio où il prépare les sessions d'enregistrement. Dès 1965, il travaille, avec son collègue Bernard Tremblay, à la prise de son et au mixage de nombreux artistes de la période yé-yé (Pierre Lalonde, Joël Denis, les Classels, les Baronets, Tony Roman). En 1965, on travaille encore en monophonie, sans technique multipiste et système de réduction de bruit. On se sert d'égalisateurs, de compresseurs et de chambres d'écho pour accentuer ou créer de l'effet sonore. Les transformations technologiques majeures proviennent de Toronto et surtout de New York. Durant ces années, le studio RCA de Montréal faisait alors figure de parent pauvre, héritant de la technologie déjà utilisée auparavant.

Avec l´exemple de la compagnie Sun et la découverte d´Elvis Presley, les multinationales s´aperçoivent qu´il est parfois rentable d´enregistrer à l´extérieur de leurs grands studios. Les studios indépendants émergent alors pour répondre à une approche plus personnalisée et innovatrice. Dans les années 1960, Harry Bragg dirige le studio RCA, très performant techniquement parlant mais avec une atmosphère un peu froide. Le studio dispose d´un magnétophone huit pistes.

Ian Terry (technicien et preneur de son au studio Tempo à Montréal)

Chronologie de l´arrivée des magnétophones multipistes à Montréal
(1´04') - Ian Terry, enregistré en 2006

«Il y avait des machines 3 pistes. C´était avant mon époque. Il y en avait chez RCA. J´en ai vu chez RCA. C´était des machines Ampex 350, je crois. Après, il y avait des 4 pistes à la fin des années 1960 et au début des années 1970. Ça c´était des Ampex 440. Moi, je suis rentré chez Studio 6, au moment où il faisait la transition entre son 4 pistes et un 8 pistes, à l´automne 1970.
- C´était assez nouveau 8 pistes?
- C´était assez nouveau. Il y avait RCA qui avait un 8 pistes et je crois que… Give Peace a chance a été fait quand?
- En 1969, lors du bed-in.
- Donc c´est André Perry qui l´a fait… avec un 8 pistes ou un 16 pistes. Je sais qu´il a transporté de son studio à Brossard sa machine de là à la chambre où était John Lennon et Yoko Ono. Je me rappelle pas si c´était un 8 pistes ou un 16 pistes. C´était au moins un 8 pistes. Pour une raison dans ma tête, je pense que c´était un 16 pistes.»
[Selon une entrevue accordée à la revue Beatlology Magazine (par Andrew Croft) en 2001, Perry raconte qu´il a utilisé pour cette session un simple magnétophone Ampex quatre pistes loué chez RCA, avec quatre microphones. Son propre équipement était utilisé à la Place des arts pour l´opéra rock Tommy. Un magnétophone huit pistes a toutefois été utilisé en postproduction.]