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Deux des événements qui cristallisent le plus les esprits au Bas-Canada, et particulièrement dans le comté d'York (avant de devenir celui de Deux-Montagnes en 1830), avant l'adoption des fameuses 92 Résolutions en 1834, sont le projet d'union de 1822 et la crise politique sous Dalhousie en 1827.

Le Projet d'Union de 1822

Une poignée d'importants marchands britanniques, sous le leadership du procureur en chef James Stuart, croient que la création des deux provinces en 1791 est une erreur en accordant des institutions parlementaires aux Canadiens français, réputés pour être réfractaires au grand commerce impérial. En soit, ces Unionaires favorisent un projet d'union des colonies du Haut et du Bas-Canada visant à réduire les droits et les pouvoirs politiques des Canadiens français.

Dans le comté d'York, la mobilisation s'effectue principalement dans la seigneurie de la Rivière du Chêne. Les Antiunionaires du comté d'York réunissent en 1822 plusieurs protagonistes des événements de 1837. On se réunit notamment à Saint-Benoît le 24 octobre 1822 sous la présidence d'Eustache-Nicolas Lambert-Dumont afin de s'opposer au projet d'Union. Les Ignace Raizenne, Jacques Labrie, Joseph-Amable Berthelot, Jean-Baptiste Dumouchel, Jean-Joseph Girouard, Jacob Barcelo, Stephen Mackay, Eustache-Antoine Lefebvre de Bellefeuille, Auguste et Frédéric-Eugène Globensky, pourtant diamétralement opposés en 1837, s'unissent pour défendre les intérêts et l'autonomie du Bas-Canada.

L'assemblée de Saint-Benoît adopte quelques résolutions dont une qui dit « que la réunion de ces deux provinces, telle que proposée dans le projet de loi qui a été discuté dans la Chambre des Communes à Londres […] serait contraire à la justice si souvent éprouvée du gouvernement britannique, en établissant une disproportion énorme dans les droits et privilèges des différentes classes des habitants du pays, en plaçant les Canadiens dans une infériorité qu'ils n'ont méritée par aucune partie de leur conduite, et en leur ôtant des jouissances qui leur ont été garanties par les traités Hes Lois qui les ont depuis confirmés ».

Lors de ce rassemblement, on forme le Comité constitutionnel du comté d'York dont le docteur Jacques Labrie, instigateur du « contre-projet », est le secrétaire. Les Antiunionaires de York amassent un total de 4 142 signatures, dont 1 503 à Saint-Eustache même, afin de contrer le projet d'union. Louis-Joseph Papineau et John Neilson se rendent pour leur part à Londres afin de présenter les pétitions des habitants bas-canadiens. Les Unionaires sont toutefois mal organisés et avec l'intervention rapide des députés du Parti canadien, le projet d'union du Haut et du Bas-Canada est retardé… jusqu'en 1840, comme on le sait.

La crise sous Dalhousie en 1827

Gouverneur en chef de l'Amérique du Nord britannique de 1820 à 1828, George Ramsay, 9e comte de Dalhousie, est reconnu pour être animé d'un sens extrême du devoir et son conservatisme politique est vraisemblablement mal adapté à la conjoncture de l'époque. Tout au cours de son « règne », Dalhousie entretient une haine sans réserve pour l'orateur de la Chambre Louis-Joseph Papineau.

À la suite des guerres napoléoniennes, les finances de l'Angleterre sont en mauvais état. De son côté, l'Assemblée législative bas-canadienne tient à conserver son droit constitutionnel de voter annuellement les dépenses du gouvernement civil et ce, devant l'obstination du gouverneur à faire voter les subsides dans le but ultime de renflouer les coffres de Londres. En vain, la Chambre refuse non seulement de voter les subsides comme le réclame le gouverneur, mais décide de les voter article par article. Il n'en fallait pas plus pour que Dalhousie porte l'affaire en Angleterre afin de faire accuser la Chambre du Bas-Canada.

En mars 1827, l'Assemblée législative rejette une fois de plus la demande de crédit du gouverneur. Dalhousie bouillonne. Il proroge la législature, dissout le parlement et ordonne de nouvelles élections. À vrai dire, Dalhousie est prêt à tout mettre en oeuvre pour empêcher la réélection des députés du Parti canadien et surtout celle de son chef, le charismatique Louis-Joseph Papineau.

Au début de novembre 1827 se tiennent les nouvelles élections durant lesquelles le gouverneur appuie ouvertement son candidat dans William Henry (Sorel), à savoir le procureur général James Stuart (le même instigateur du projet d'union de 1822). Résultat : le Parti canadien obtient une majorité accrue au suffrage populaire. Papineau triomphe. L'ouverture de la nouvelle session parlementaire s'effectue le 20 novembre 1827. Papineau est de nouveau élu comme orateur de la Chambre ; choix que Dalhousie désapprouve une fois de plus. Il invite la députation canadienne à faire un autre choix, mais celle-ci s'y refuse obstinément.

Un conflit de personnalité entre Dalhousie et Papineau est donc palpable. Le gouverneur voit en ce dernier un représentant du « despotisme libéral ». Aux dires de Peter Burroughs (auteur de la biographie de Dalhousie dans le Dictionnaire biographique du Canada), Papineau représente « l'incarnation même des forces diaboliques contre lesquelles il avait luttées ; les finances n'étaient plus, si jamais elles l'avaient été, le réel objet de litige ». Le gouverneur proroge une seconde fois la législature. C'est la consternation en Angleterre et au sein de la population bas-canadienne. Plusieurs quotidiens américains, britanniques et bas-canadiens dénoncent les agissements arbitraires de lord Dalhousie.

Entre-temps, les députés canadiens se mobilisent afin de faire circuler une vaste pétition réclamant le départ du gouverneur et traduisant aussi les principaux griefs de la province. Lors d'une assemblée tenue à Québec le 13 décembre 1827 devant 200 personnes, on adopte l'idée de soumettre une pétition à sa majesté. Ce sont John Neilson, Denis-Benjamin Viger et Austin Cuvillier qui sont chargés d'emmener la pétition en Angleterre. En deux mois tout au plus, on recueille plus de 87 000 signatures. À lui seul, le comté d'York, dont le notaire Ignace Raizenne est le représentant, recueille 4 199 appuis. Londres conclut finalement que la situation ne se règlera jamais sous la gouverne de lord Dalhousie. Il est en conséquence muté en Inde en tant que commandant des forces anglaises en juillet 1829.

C'est dans ce contexte qu'est organisée le 4 juin 1827 à Saint-Eustache l'Assemblée constitutionnelle de la partie nord du comté d'York afin de « prendre en considération la conduite de la majorité de la Chambre d'assemblée » et surtout celles du gouverneur Dalhousie et du seigneur, député et lieutenant-colonel Eustache-Nicolas Lambert-Dumont. Sous la présidence d'Ignace Raizenne, l'assemblée adopte une quinzaine de résolutions et forme un Comité de la partie nord du comté d'York. Parmi ses membres, soulignons Jean-Baptiste Féré, Joseph-Amable Berthelot, William Henry Scott, Jean-Baptiste Bélanger, François Lefebvre de Bellefeuille et Jacques Labrie, secrétaire de l'assemblée.

Vexé de la tenue d'un tel rassemblement à son égard, le lieutenant-colonel Lambert-Dumont destitue plusieurs de ses officiers de milice présents à l'assemblée. S'en suivit un échange virulent de lettres ouvertes dans La Minerve entre le docteur Labrie et le seigneur Lambert-Dumont. À l'élection de 1827, Labrie se porte d'ailleurs candidat contre ce dernier qui est le représentant sortant du comté d'York (élu de 1804 à 1808 et de 1814 à 1827). Le docteur de Saint-Eustache est d'ailleurs élu à la suite du désistement de Dumont. En juillet 1828, le même Dumont traduit devant une cour de justice spéciale les 17 individus accusés de désobéissance à l'assemblée du 4 juin 1827, notamment Jean-Olivier Chénier, récemment arrivé dans le comté, Jean-Joseph Girouard, Jean-Baptiste Dumouchel et Jacques Labrie.

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Gouverneur Dalhousie
1827
Inconnu
ATTACHEMENT DE TEXTE


3

Assemblée contre le gouverneur Dalhousie
1930
Inconnu
ATTACHEMENT DE TEXTE