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Exode des doukhobors vers la Colombie-Britannique, après la perte de leurs terres en Saskatchewan
1913
Près de Yorkton, Saskatchewan, Canada


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Destination Colombie-Britannique!

De 1908 à 1913, plus de 5000 doukhobors émigrèrent dans la région de Boundary-Kootenay, en Colombie-Britannique, où ils purent conserver leur mode de vie communal et voir leurs entreprises prospérer. Le village au confluent de la rivière Kootenay s'appelait Waterloo, mais Verigin le renomma Brilliant pour éliminer toute connotation militaire.

La région fut nommée Dolina Ooteshenie (prononcé " ou-ti-chen-ya ') ou vallée de la Consolation. L'autre rive de la rivière Kootenay finit par être appelée par le nom abrégé de Ooteshenie, nom qu'elle conserve encore aujourd'hui. Les doukhobors commencèrent par acheter 14 000 acres, mais la superficie totale des terres appartenant à la CCUB en Colombie-Britannique finit par atteindre 19 000 acres.

Pour se procurer ces propriétés, Verigin vendit des machines agricoles et d'autres biens en Saskatchewan. Les terres de la Colombie-Britannique furent achetées au nom de Verigin au prix de 50 $ à 500 $ l'acre. La vente des machines n'étant pas suffisante pour couvrir les frais, Verigin négocia un prêt en se servant du travail des vaillants membres de sa communauté comme garantie.

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Une des premières scieries de la communauté doukhobore
Vers 1910
Près de Slocan, C.-B., Canada


Crédits:
Exposition Autochrome, Doukhobor Village Museum, Castlegar, C.-B.

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Le premier endroit où ils s'établirent était en bonne partie couvert de feuillus, que les doukhobors abattirent dès leur arrivée. Il défrichèrent la terre à la main, à l'aide de chevaux, sans aucune machine motorisée. Les feuillus furent remplacés par des vergers de pommiers, de poiriers, de pruniers, de cerisiers, d'autres arbres à fruits et de vignes. Ils semèrent aussi des céréales.

Les doukhobors construisirent des scieries pour le bois de construction extrait des terres densément boisées. Les premières habitations communales furent rapidement construites pour héberger les premiers colons doukhobors et les nombreux autres qui allaient suivre. Les scieries allaient devenir un pilier de l'entreprise, et la communauté, ou la CCUB, allait jouer un rôle important dans l'industrie forestière du centre de la province.

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Verger et village de Grand Forks, en Colombie-Britannique
Vers les années 1920
Grand Forks, C.-B., Canada
ATTACHEMENT DE TEXTE


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Les doukhobors achetèrent d'autres terres dans la région de Grand Forks. Les villages de Grand Forks, comme les autres villages de la colonie, se dotèrent d'entreprises autonomes. Dans cette région, les doukhobors construisirent non seulement une scierie, mais aussi une usine de briques, et les bâtiments doukhobors furent bientôt faits de briques plutôt que de bois uniquement.

Grâce au climat et au relief plutôt plat de la région de Grand Forks, les doukhobors purent cultiver et récolter du blé. Ils construisirent un petit moulin à farine. Ils plantèrent des arbres à fruits, des framboisiers, des fraisiers, des bleuetiers et des mûriers. Ils se servaient des fruits pour faire de la confiture, produit dont ils raffolaient et dont ils maîtrisaient l'art. Ils construisirent aussi une petite confiturerie à Grand Forks.

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Centre de prière doukhobor
Vers 1912
Ooteshenie, C.-B., Canada
ATTACHEMENT DE TEXTE


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Dans tous les villages, la plupart des hommes connaissaient la menuiserie, et les tailleurs qui confectionnaient des vêtements étaient aussi répandus que les femmes qui savaient tisser. Les doukhobors achetèrent des terres supplémentaires dans les régions de Lundbreck et de Cowley en Alberta. L'agriculture et l'élevage allaient permettre de soutenir les autres activités. En 1911, les doukhobors avaient défriché des terres, planté plus de 50 000 arbres à fruits et construit des routes, des traversiers et des ponts-levis. Tout indiquait que la communauté autonome, autarcique, pacifiste et utopique dont avait rêvé Verigin avait pris forme. Les doukhobors avaient rarement besoin d'aide extérieure.

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Maquette du Doukhobor Village Museum
1 mai 1996
Castlegar, C.-B., Canada


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En tout, les doukhobors construisirent environ 90 villages dans la région de Boundary-Kootenay. Les villages furent construits d'une manière encore plus communale qu'ils ne l'avaient été en Saskatchewan. Au lieu de construire des maisons unifamiliales en rangée des deux côtés d'une large rue, les doukhobors construisirent tous leurs villages en Colombie-Britannique de la même manière : deux doms (maisons) principales, comportant chacune une cuisine, une salle à dîner, une grande salle communautaire et des chambres.

Chaque village avait des dépendances, un banya (sauna ou bains) traditionnel, une forge, des granges et un bâtiment multifonctionnel en forme de U. Dans ces villages, les familles devaient vivre apparemment en paix et en harmonie. Les villages comptaient souvent de 50 à 60 résidants, soit 8 à 10 familles, qui travaillaient ensemble pour le bien de la communauté. Contrairement aux villages de la Saskatchewan, la majorité des villages de la Colombie-Britannique était nommés en fonction de leur aîné (par exemple, le village de Ziberov était nommé en hommage à Nicholai Ziberov, l'aîné en chef). Quelques villages reçurent des noms russes traditionnels (qui pourraient se traduire par Don de Dieu ou Paix, par exemple).

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Doukhobors triant des fruits
Vers 1925
West Kootenay, C.-B., Canada


Crédits:
Photo par Thomas Gushel, un célèbre photographe de la culture doukhobore

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La vie dans les villages débutait à l'aube. Les femmes se levaient les premières et préparaient un copieux déjeuner végétarien. Le déjeuner commençait par des prières et des chants collectifs. Une fois le déjeuner terminé, les fidèles récitaient des psaumes, des hymnes et des prières avant d'entamer la journée. Durant les premières années, le travail quotidien des habitants consistait à défricher la terre, à couper du bois et à arracher des souches. Plus tard, ces tâches furent remplacées par l'abattage commercial d'arbres ou l'entretien des vergers et des terres céréalières.

Occupés par leur travail à la scierie, au moulin à farine, dans les vergers et dans les champs, les doukhobors avaient très peu de temps pour les loisirs. À cette époque, leur devise « Labeur et vie paisible » était mise en application aussi intensément qu'à tout autre moment de leur histoire.

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Oche Nash (la prière au Seigneur) chantée en russe
1967
Grand Forks, C.-B., Canada


Crédits:
Chorale Centenial Doukhobor

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Outre les prières, les hymnes et les psaumes obligatoires, le dîner était une expérience communale (sauf quand les travailleurs étaient embauchés par des entreprises extérieures). À la fin de la journée de travail, un souper communal était servi. Celui-ci était précédé de prières, d'hymnes et de psaumes comme au déjeuner, mais cela se poursuivait après le repas. Les villageois se couchaient tôt, car la journée suivante n'allait pas tarder à commencer. La journée de travail durait habituellement 11 heures, mais personne ne comptait son temps.