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Souvenirs et souvenances

Le travail de nombreux artistes vernaculaires est ancré dans leurs souvenirs d’événements passés. Positives ou négatives, directes ou indirectes, les expériences que ces artistes intègrent à leurs œuvres appartiennent au passé. Parfois, le contenu est de nature documentaire, d’autres fois plus expressif ou adapté. Pour beaucoup, l’objectif est de préserver et de raconter des histoires significatives.

Originaire de Moose Jaw, en Saskatchewan, Eva Dennis était peintre. Elle a enseigné dans des écoles rurales à classe unique pendant 38 ans. Elle était mariée à l’agriculteur Wesley Dennis et ils ont tous deux commencé à peindre dans les années 1950 et ont continué jusqu’à leur retraite. Les deux artistes ont peint leurs souvenirs de l’histoire des pionniers.

Écoliers, enseignants, et une charrette tirée par des chevaux devant une école à classe unique au milieu d’un champ cultivé.

Eva Dennis – Ready for the Photographer

Eva Dennis considérait la peinture comme un moyen de préserver la mémoire. Tandis que le travail de son mari illustrait l’histoire des pionniers de façon romantique, ses œuvres étaient de style documentaire et montraient la complexité de la vie des pionniers. Ses tableaux évoquaient de façon détaillée ses souvenirs sur des événements précis alors qu’elle travaillait comme enseignante dans des écoles rurales. Elle se souvenait avec précision du nom de chaque personne et de chaque événement.

Les artistes vernaculaires travaillaient également selon le principe de la « souvenance ». Contrairement aux souvenirs, la souvenance est basée sur des histoires, des récits ou une version imaginaire d’un événement. Ceci comprend des scènes déformées en termes d’espace, de temps, de perspective qui incluent des informations plus précises que ce qui serait normalement visible.

Jan Wyers était un peintre originaire de Windthorst, en Saskatchewan. Il a immigré des Pays-Bas aux États-Unis et après avoir participé à des activités de battage, il s’est installé en Saskatchewan. Quand il ne pouvait pas pratiquer l’agriculture (en hiver, ou parce qu’il était malade par exemple) il se mettait à peindre. Les artistes contemporains et les commissaires d’art appréciaient ses œuvres qui apparaissaient dans des expositions d’envergure à l’échelle nationale.

Son œuvre colorée sans titre est présentée dans cette exposition à titre d’exemple d’une perspective augmentée par l’imagination. L’image montre un grand angle de vue d’un champ et des personnes qui s’y trouvent, permettant de montrer une variété de gens, de machines et d’étapes du travail accompli dans une seule image, pleine d’activités.

Plusieurs personnes effectuant des travaux agricoles dans un champ, formant des tas et tirant de l’équipement avec des chevaux.

Jan Wyers – Untitled

En essayant de raconter une histoire mémorable, ce type d’artistes est très attentif aux détails. Ils vont souvent inclure le plus de contenu possible dans leur œuvre. Que ce soit pour documenter une vue d’ensemble de l’événement ou pour évoquer des émotions liées au souvenir, la complexité visuelle est l’une des principales techniques employées.

Originaire de Saskatoon, Graeme Patterson était un artiste multidisciplinaire. Diplômé de l’Université NSCAD, il est ensuite retourné à la ferme familiale à Woodrow, en Saskatchewan où, enfant, il passait ses étés et ses vacances avec ses grands-parents.

Vue du devant d’un atelier miniature avec un toit en métal et des briques de couleur grise qui sont posées sur une base en métal noire. La porte du garage est ouverte et à l’intérieur, on peut voir une échelle et plusieurs objets de l’atelier en miniature.

Graeme Patterson – The Shop

C’est là qu’il a créé Woodrow, une installation composée de versions miniatures des bâtiments du village de Woodrow, et d’une animation image par image de personnages explorant les bâtisses et les « fantômes » de leurs histoires. Un de ses modèles, The Shop, était l’atelier de son grand-père contenant de minuscules versions des sculptures en développement. Bien que cette œuvre soit directement reliée à ses souvenirs, elle est assez générale pour rappeler aux spectateurs leurs propres souvenirs de la vie rurale.

Les œuvres basées sur des souvenirs pouvaient faire preuve de douce nostalgie, documenter la réalité de façon informative ou encore la représenter dans toute sa dureté. Elles donnaient non seulement au public un aperçu de l’histoire, mais aussi l’interprétation de celui ou celle qui s’en souvenait. L’expérience devient idéalisée et le spectateur a le sentiment qu’elle rejoint ses propres souvenirs.