Un vol local suscite un débat national – L’étrange cas d’Eugénie Côté
 
            
            Photographie
Résidence d’été de la famille Molson
Claude Bouchard
Les vols à Métis sont de grosses nouvelles. Les arrestations sont peu nombreuses, et les condamnations rares. Le cas d’un vol local est devenu une nouvelle nationale en 1918.
Lorsqu’elle s’est introduite dans la maison de Métis de Mme Thomas Molson en octobre 1918, Eugénie Côté avait déjà été condamnée pour un autre vol commis chez une veuve de Mont-Joli. À la résidence des Molson, elle a volé 25 fourchettes en argent, 22 cuillères en argent, un couteau à beurre à manche en os, une paire de jumelles d’opéra et un étui, des cartes à jouer, une boîte contenant une paire de ciseaux et une brosse à dents, deux balles, deux nappes en lin et 50 articles de lingerie portant le monogramme « J.T. Molson ». La valeur totale des articles volés était de 50 $.
Le vol était à peine digne de mention. Comment alors l’histoire d’Eugénie Côté s’est-elle retrouvée dans les pages éditoriales du Toronto Globe? Elle a été arrêtée dans une scierie de Gaspé pour avoir prétendu être un homme. Porter des vêtements d’homme était une infraction pour une femme à cette époque. Mais en temps de guerre au Canada, lorsque l’arrestation d’une femme faisant son devoir patriotique faisait la une des journaux, beaucoup se portaient à sa défense. Son sort a été dénoncé par des députés en colère à la Chambre des communes et dans la page éditoriale du journal The Globe.
Ce n’est que lorsqu’elle a été incarcérée à la prison de Rimouski que la vérité a été mise au jour. Eugénie était experte en métamorphose. Elle ne faisait pas son devoir patriotique, mais tentait plutôt d’échapper à la loi. Elle avait adopté une nouvelle identité, changé de sexe et revêtu des vêtements d’homme pour éviter l’emprisonnement.
Eugénie Côté a de nouveau été condamnée. Mais cette fois-ci, elle fut envoyée dans une prison dont elle ne pouvait pas s’échapper : le pénitencier de Kingston. Là, on l’a forcée à enfiler des vêtements de femmes et on lui a appris à coudre.