7.1 Les travailleurs
Ouvert de la mi-avril à la fin de novembre, le canal de Soulanges, sous la responsabilité du gouvernement fédéral, était un employeur important dans la région de Soulanges. À titre d'exemple, en 1958, année de sa fermeture, plus de 132 personnes y travaillaient de façon permanente ou temporaire. Sous la supervision du surintendant, le bon fonctionnement de la voie navigable et l'entretien de ses installations étaient effectués par du personnel spécialisé composé d'éclusiers, de pontiers, d'électriciens, de mécaniciens, de charpentiers, de forgerons, de menuisiers, de scaphandriers, de peintres, d'employés de bureau, de journaliers et de magasiniers. Le surintendant, quant à lui, assurait l'administration et la surveillance du canal. Plusieurs employés travaillaient et résidaient dans le village de Pointe-des-Cascades où étaient situés les bâtiments administratifs, les entrepôts et les ateliers du canal de Soulanges. D'ailleurs, certains de ces édifices sont encore visibles de nos jours. Les quarts de travail étaient de 12 heures par jour et les semaines alternaient entre l'horaire de jour et de nuit. Notons aussi, en raison de l'emprise des glaces sur le fleuve Saint-Laurent qui mettent fin aux activités du canal en hiver, que la majorité des emplois étaient saisonniers.
Cette situation demandait une grande facilité d'adaptation aux travailleurs afin de leur permettre de boucler leur budget. En effet, au début du 20e siècle, les salaires de plusieurs ouvriers spécialisés ou non sont peu élevés. Par exemple en 1903, un journalier travaillant au canal de Soulanges recevait en moyenne un salaire de 9 $ par semaine. Les historiens Yvon Desloges et Alain Gelly estiment qu'en 1900, une famille se composant de cinq personnes devait disposer d'une somme de 9,64 $ par semaine pour répondre à ses besoins essentiels1. Heureusement pour le personnel du canal, leurs conditions salariales s'amélioreront graduellement pour atteindre des normes acceptables dans les années 1940, soit quelques années avant la fermeture du canal en 1958. De plus, la possibilité de recevoir des prestations d'assurance-chômage rendra plus confortables les hivers des travailleurs saisonniers.
1. Yvon Desloges et Alain Gelly. Le canal de Lachine : du tumulte des flots à l'essor industriel et urbain, 1860-1950. Sillery, Septentrion, 2002, p. 163.
Crédits:7.2 Des emplois connexes
Si de nombreux emplois étaient directement reliés au fonctionnement et à l'entretien du canal, le passage de cette voie navigable dans la région de Soulanges permettra à plusieurs personnes d'occuper des postes rattachés à la navigation. Engagés directement par les compagnies maritimes, des hommes occuperont les fonctions de capitaines, pilotes, bateliers, mécaniciens et matelots sur les navires parcourant les eaux du fleuve Saint-Laurent. Par exemple, à Pointe-des-Cascades, en 1959, 53 résidents travaillaient au canal, tandis que 25 autres naviguaient sur le Saint-Laurent. Comme le soulignait Pierre Clément, ancien employé du canal de Soulanges et ancien directeur de la Société de recherches historiques de Pointe-des-Cascades, il n'était pas rare qu'un besoin pressant en personnel à l'approche des écluses force les capitaines de certains bâtiments à engager de façon ponctuelle des jeunes sans emploi comme matelots afin de franchir les dernières étapes de leur parcours1. Pour ces hommes, c'était bien souvent une première expérience maritime. Certains en feront même leur futur métier.
1. Témoignage de monsieur Pierre Clément cité dans François Cartier. Canal de Soulanges. D'un défi à l'autre. Les Coteaux, Société de développement du canal de Soulanges / Musée régional de Vaudreuil-Soulanges, 1999, pp. 82-83.
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