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Les victimes veulent être indemnisées

Plusieurs des blessés sont transportés à l’Hôpital Civic d’Ottawa par train tôt le lundi matin, y compris la famille Turcotte, Ed Muldoon et sa cousine Eileen McMahon.

Marion Jamieson prend place dans le train de l’hôpital, où elle s’occupe des personnes les plus grièvement blessées. Bon nombre des blessés meurent en route vers l’hôpital, et la tension demeure palpable pendant que les infirmières et les médecins épuisés s’efforcent d’apporter autant de réconfort que possible aux victimes. Alors que Marion tient dans ses bras un homme que la morphine a rendu nauséeux, l’homme la regarde soudain et lui demande : « Suis-je mort et rendu au paradis? » Personne autour ne peut s’empêcher de rire malgré la tristesse de la situation.


Un train vers une nouvelle destinée

Ed et Eileen, rescapés des débris quelques heures auparavant, sont meurtris, écorchés et secoués. Ed se souvient encore très bien de deux représentants du Chemin de fer Canadien Pacifique (CFCP) montant à bord du train de l’hôpital, puis insistant pour que lui et Eileen, et d’autres personnes à bord, signent un formulaire de décharge exonérant le CFCP de toute responsabilité. Troublés et traumatisés, ils signent la décharge.

Photo d’un petit garçon, Bernard Turcotte dans un lit d’hôpital, assis et souriant devant la caméra à l’Hôpital Civic d’Ottawa après l’accident ferroviaire d’Almonte, 1943

Bernard Turcotte à l’Hôpital Civic d’Ottawa, janvier 1943

 

Le jeune Bernard Turcotte, quant à lui, passe le trajet à bavarder avec d’autres passagers. On lui donne 25 cents et une poignée de bonbons Life Savers à la menthe, tandis que ses parents, Maurice et Cécile, oscillent entre la conscience et l’inconscience.

En raison de l’étendue de leurs blessures, les Turcotte doivent élire domicile à l’Hôpital Civic d’Ottawa durant les six mois qui suivent. Tous les membres de la famille ont subi de multiples fractures aux jambes et sont lourdement médicamentés après l’accident pour soulager leur douleur et faciliter leur rétablissement. Cécile n’apprendra le décès de sa fille, Denyse, qu’après ses funérailles. Hébergés dans différents services à différents étages de l’hôpital, les membres de la famille ne se reverront pas avant un mois.

Photo de Cécile Turcotte assise sur un lit avec une infirmière à ses côtés à l’Hôpital Civic d’Ottawa après l’accident ferroviaire d’Almonte, 1943

Cécile Turcotte à l’Hôpital Civic d’Ottawa, 1943

 

Physiquement, Cécile va beaucoup mieux que son mari et son fils. Elle passe son temps à jouer aux cartes avec d’autres patients et se fait de nombreux amis proches.


Avocats et responsabilité

Lorsque les médecins du Chemin de fer Canadien Pacifique (CFCP) apprennent à Maurice et à Bernard qu’ils ne marcheront plus jamais, Maurice communique avec un avocat bien placé pour qui il avait fait de menus travaux. Cet avocat s’allie avec un cabinet d’avocats de Toronto pour amener le CFCP à offrir à la famille de meilleurs soins médicaux et une indemnisation financière. L’affaire n’est jamais portée devant les tribunaux, mais la famille obtient un règlement en espèces, incluant un montant pour l’éducation de Bernard. Grâce aux spécialistes qui s’occupent des Turcotte, Maurice et Bernard sont capables de marcher de nouveau, tout à fait normalement. Près de 70 ans plus tard, Bernard estime que l’accident a eu des conséquences aussi bien positives que négatives sur sa famille. La mort de sa sœur fut horrible, mais le règlement a permis à la famille de quitter un immeuble locatif de qualité minimale pour emménager dans un quartier plus favorisé, le quartier Glebe à Ottawa, où Bernard a reçu une meilleure éducation.