L’aspect de la radio
La popularité de la radio s’est accrue dans les années 1920, en partie grâce à l’amélioration de la programmation. Les entreprises produisent des récepteurs plus fiables et plus faciles à utiliser. En entrant dans les salons, les récepteurs radio sont devenus des objets d’intérêt visuel autant qu’auditif. Les fabricants ont conçu des meubles dans des styles historiques populaires. Les meubles de style Queen Anne ou Chippendale se vendent bien. Ces styles correspondent aux goûts des propriétaires des classes moyennes et supérieures.
La publicité présente la radio comme un objet tout à fait moderne. Mais les radios ressemblaient à des meubles existants et se présentaient dans des styles familiers. Les design modernes témoignent de l’enthousiasme suscité par le nouveau média électronique, capable d’assurer une communication instantanée. Les lignes en zigzag et les décorations abstraites au design « moderne » d’inspiration française donnaient vie à des récepteurs par ailleurs banals.
Au milieu des années 1930, les récepteurs radio eux-mêmes ont contribué à faire entrer le design moderne dans les foyers canadiens. Les petits modèles de table sont les premiers à afficher un style moderne. La façade du RCA Victor « Globetrotter P6-1 » présente le motif Art déco courant d’une « fontaine gelée ». Ce motif a pu rappeler aux utilisateurs les gratte-ciels effilés qui commençaient à marquer l’horizon des villes, comme Montréal. C’est à son usine principale de Montréal que RCA produisit cette radio.
D’autres modèles de table présentaient la rapidité des communications radio grâce à un design épuré. Le style épuré est devenu populaire dans les années 1930 et a apporté des formes courbes à l’architecture, aux automobiles et aux produits de tous les jours. Le balayage horizontal des détails métalliques autour du bord et à travers le haut-parleur de cette radio Sparton en bois illustre cette tendance populaire.
Le modèle 85 de Marconi témoigne de l’abandon progressif des meubles d’époque au profit d’appareils modernes dans les grands meubles. La grille du haut-parleur est placée derrière des fuseaux sculptés. Les fuseaux évoquent les cordes d’un instrument de musique ou peuvent faire référence aux détails ornementaux des meubles d’époque. Ces détails décoratifs sont associés à un grand cadran de radio ovale qui évoque les compteurs de vitesse des voitures ou des avions contemporains. Au-dessus, un « œil magique » s’allume, marquant visuellement l’arrivée d’une station sur une fréquence claire. Dans l’ensemble, ce récepteur convenait parfaitement à un salon canadien doté d’un mobilier traditionnel ou moderne.
Contrairement aux grands meubles en bois, les radios de table plus petites ont permis aux concepteurs de travailler avec de nouveaux matériaux. Parmi ces nouveaux matériaux, on trouve la bakélite et d’autres formes précoces de plastique. Le modèle D-25 de Crosley, que l’on voit ci-dessous, en est un excellent exemple. Ses surfaces lisses et arrondies conviennent parfaitement à l’idée de vitesse associée à la radio. Les sons pouvaient voyager instantanément d’un endroit à l’autre de la planète jusqu’à la maison. La forme et le matériau contribuaient à représenter la modernité de la radio.
Les récepteurs radio sont devenus des éléments colorés dans les salons, les cuisines et les chambres à coucher. Les designers expérimentent avec les formes et les pigments. Par exemple, la gamme de radios « Baby Champ » de Northern Electric mettait en avant la diversité des couleurs disponibles. Dans les années d’après-guerre, les gens ont continué à associer la radio au design moderne. L’épuration des lignes et l’ornementation de l’Art déco ont cédé la place à des formes plus simplifiées et rectangulaires. Cela se remarque, par exemple, dans le changement de design du Baby Champ dans les années 1940.